Eiky' Sorti du lit
Messages : 36 Date d'inscription : 16/01/2011 Localisation : Va voir là-bas si j'y suis.
| Sujet: My Madness Againt My Heart Lun 17 Jan - 15:59 | |
| Bienvenue dans mon petit repertoire de FanFic dont je suis l'auteur, celle-ci sont transférés d'un autre site mais ce sont bien les miennes. Donc voici ma première FanFic : My Madness Againt My HeartDescription : Damien est né dans une famille extrêmement riche, mais désirant toujours plus de Poké-Dollars. Exténué, il sombra dans une folie meurtrière. Il devint un tueur en série redoutable, car il possédait un terrible pouvoir : être capable de fusionner avec n'importe quel Pokémon. Mais au cours de sa cavale, au fil de ses meurtres, il se rendra bientôt compte qu'il possède un autre don tout aussi exceptionnel : celui de posséder un cœur. Chapitre 1 : Tomorrow will be a new day... - Spoiler:
« Espèce de sale gosse, tu n'as toujours pas apporté la moindre piécette ! Marine, ramène-le ici que je le punisse ! » hurla Pierre, le père de Damien.
Son épouse s'exécuta et courut après le petit garçon qui essayait de lui échapper. Mais son grand frère, Silver, lui barra la route et le saisit par le bras.
« Ah, lâche-moi, pitié ! protesta l'enfant qui se débattait comme un diable.
- Tu veux que j'aie de la pitié pour toi, frère indigne ? ricana Silver. Tu n'es même pas capable de voler la sucette d'un bébé ! Que veux-tu que l'on fasse d'un gamin qui ne rapporte pas d'argent ? Tu n'es qu'une bouche à nourrir en trop ! Tiens, maman, il est à toi ! »
Il poussa son frangin qui fut violement rattrapé par la femme. Elle l'entraîna devant son père et le força à se mettre à genoux en lui présentant son dos. Elle lui retira sans ménagement son tee-shirt élimé, couvert de taches de sang.
« Tu sais très bien ce qui arrive quand tu rentres bredouille, n'est-ce pas ? lança Pierre.
- Je vous en supplie, je n'en peux plus...gémit Damien.
- Cesse de geindre ! beugla l'homme en se saisissant du fouet que lui tendait Marine. Tu en auras 20, et tu iras te coucher avec juste un quignon de pain dans le ventre et de l'eau ! Et encore, je suis clément, car tu aurais pu ne rien manger ! »
Les coups de fouets claquèrent comme des coups de tonnerre.
Une fois. Damien retint un hurlement.
Deux fois. Il sentit un liquide chaud et poisseux couler le long de son échine.
Trois fois. Les entailles sur son dos ne cessaient de se multiplier.
Quatre fois. Ses anciennes blessures avaient cédé, répandant leur pus qui suivit le sillon irrégulier de sa colonne vertébrale.
Cinq fois. Le garçon tenta de s'enfuir, mais la douleur s'était étendue aux autres membres qui, par conséquent, refusaient de lui obéir.
Six fois. Il ferma les yeux, se mordant la lèvre pour ne pas crier.
Sept fois. Il vit des gouttes de sang perler de sa bouche tant il avait serrer les dents.
Huit fois. Sa vision se troubla, et tous ses muscles l'élançaient avec force.
Neuf fois. Il fut pris de nausées, et ses élancements se transformèrent en convulsions.
Il n'y eut pas de dixième fois. Du moins, il le croyait. À vrai dire, il s'était évanoui tant il souffrait. Mais son tortionnaire continua jusqu'au bout de le flageller. Il le battu sans discontinuations. Mais l'enfant ne sentait plus rien. Il n'y avait même nulle trace d'affliction sur son visage au teint blafard, et le blond sale des quelques mèches de cheveux cachant son large front ne faisait qu'accentuer sa pâleur. Dans cet état, personne ne pourrait imaginer que Damien vient d'une famille riche...
Damien se réveilla dans sa chambre, sur son lit, où il avait été jeté comme une poupée de chiffon. Il se redressa en grimaçant, tant son dos le faisait souffrir. Mais il avait l'habitude d'être battu par son père.
Cet homme cupide, si riche que ses héritiers pourrait vivre sans travailler, et ce sur des générations, n'était fier de Silver que parce qu'il lui rapportait tous les jours plus de 5000 Poké-Dollars, mais il le haïssait lui, le plus jeune, car il ne parvenait pas à lui obtenir ne serait-ce que 10 pièces de monnaie.
Bien sûr, comme il travaillait beaucoup moins bien que son grand frère, Damien est traité comme un moins que rien à sa demeure, le château Redsworm, situé non loin de Londres.
Alors que son frangin avait une grande chambre chauffée, entretenue par une femme de ménage, le petit garçon, lui, logeait dans la mansarde sous les toits. La pièce était si petite qu'il y avait à peine la place d'y mettre un matelas et un tabouret, qui servait de table de nuit. Parfois, quand il pleuvait, l'eau s'infiltrait et mouillait sa couchette.
L'estomac de l'enfant gargouilla, et il prit le pain rassis posé sur sa table improvisée. Il le regarda et le jeta avec violence contre la vieille porte en bois à moitié rongée par les termites. Il avait remarqué que la croûte avait moisi.
Il serra les poings en pensant à Silver qui devait déguster en ce moment des mets raffinés, digne des plus grands restaurants, avec Pierre et Marine, son abominable femme, qui vivait dans la luxure, toujours vêtue des tailleurs les plus chers, et qui ne se souciait nullement du sort de ses fils, ni de ce qu'ils devaient faire pour acquérir cet argent tant convoité.
Car ces Poké-Dollars étaient les fruits du vol, et son grand frère était passé maître dans cet art malsain. Avec l'aide de son Corboss, il pouvait survoler la ville, et fondre sur sa proie aussi vif que l'éclair. Cet oiseau des ténèbres, possédant la capacité Larcin, n'avait aucun mal à dérober les porte-monnaie, les bijoux, ou toutes autres choses ayant de la valeur.
Mais, lui, le petit Damien, n'arrivait à rien avec Feunard, son seul compagnon. Car le pauvre renard à sept queues n'était pas très bien entraîné, aussi avait-il du mal à combattre les Pokémon des victimes, il perdait souvent, forçant son dresseur à prendre la fuite en abandonnant la récolte de son acte frauduleux.
Il regarda son tabouret. Son tee-shirt y avait été posé, toujours aussi abîmé. Il le remit et se saisit de sa Poké-Ball, qui était caché en dessous. Il appuya sur le bouton central et son majestueux Pokémon Feu apparut dans une douce lumière incarnate. Ils se dévisagèrent un instant, sans bouger, sans émettre le moindre son. Mais le Feunard avait remarqué que le regard de son jeune maître était à présent animé d'une lueur vacillante, cruelle.
Celui-ci se pencha auprès de lui et caressa longuement sa fourrure chaude, du même blond platine que les cheveux du garçon. Sur son visage aux traits marqués à cause de sa sous-alimentation, se dessina un sourire horrible, sanguinaire.
« Demain sera un jour nouveau, Feunard, murmura-t-il. Demain, il sera l'heure de nous élever, pour connaître nous aussi l'apothéose ! »
Le renard acquiesça. Sans doute ne comprenait-il pas que cette façon de s'exprimer ne convenait pas à un enfant de 10 ans.
Le lendemain, Damien se leva aux aurores, emportant sa précieuse Ball. Il descendit silencieusement les escaliers et s'arrêta devant la porte de la chambre de son frère. Il l'entrouvrit et s'assura que celui-ci dormait.
Certain que la voie était libre, il se faufila discrètement dans la pièce, longeant les meubles, et fouilla dans la penderie. Il déroba un épais pull noir à capuche, et un jean bleu indigo un peu large, aussi prit-il une ceinture. Il ressortit à pas feutrés, refermant la porte.
« Si seulement je pouvait être aussi efficace tous les jours... » songea-t-il en constatant qu'il avait réussi son vol.
Il remonta à la hâte se changer dans la mansarde, puis alla au rez-de-chaussée. Il se dirigea vers la cuisine, et se saisit d'un grand couteau qu'il n'eut cependant aucun mal à camoufler dans les vêtements trop amples de Silver.
Il quitta le château précipitamment, entendant les domestiques descendre pour préparer le petit-déjeuner de sa famille. Prune, une jeune servante dont la longue et fine chevelure violette rappelait parfaitement son prénom, s'attela à la tâche. Alors qu'elle finissait de faire cuire les œufs pour le brunch, elle voulut s'avancer en faisant une tarte aux pommes pour la collation de l'après-midi, mais elle constata avec étonnement qu'il n'y en avait plus une seule dans la panière à fruits.
« Oh, alors il me faudra aller en acheter aujourd'hui au marché, soupira-t-elle. Mais j'étais pourtant sûre qu'hier encore, il en restait une dizaine... »
Chapitre 2 : I will do it if it's necessary - Spoiler:
Damien marchait rapidement, avec dans ses bras la dizaine de pommes qu'il avait emportée pour manger un peu. Il n'y avait pas grand monde, puisque le soleil était à peine levé, mais le garçon savait où aller pour voir des gens. Il se dirigea rapidement vers le centre-ville. Il s'arrêta dans une ruelle voisine et croqua allègrement dans les fruits qu'il transportait.
Une fois son léger repas terminé, il se fondit dans la petite foule qui s'agglutinait autour de divers stands sur la place principale. Le jeudi, c'était le jour du marché. Les étalages offraient à la vue des passants un festival de couleurs, allant du vermillon au vert d'eau, du parme au doré, de l'azur à l'orange sanguine. C'est comme si Londres s'était enroulé dans la pure et divine écharpe d'Iris.
La foire était non seulement plaisante pour les yeux, mais aussi pour les narines. De douces senteurs émanaient des stands de fleuristes, les roses, les cyclamens, les tulipes, et aussi des odeurs plus soutenues, comme les épices des étals marocains. Sans compter l'agréable arôme qui se dégageait des poulets en train de cuire sur un immense tournebroche, rappelant à l'enfant qu'il n'avait pas encore mangé à sa faim.
Mais il ne s'attarda pas à poser le regard sur les marchandises, il ne chercha pas non plus à humer davantage les effluves enivrantes du marché. Son seul intérêt était de trouver une cible. À côté de son objectif, son environnement, qui pourtant est plutôt attrayant que ce soit pour la vue ou pour l'odorat, n'est que fioriture. Il n'eut même pas envie d'essayer de voler quelque chose, car selon lui, il n'y a que l'argent qui compte.
Soudain, il s'arrêta et serra le couteau caché sous son pull-over. Ses lèvres s'étirèrent en un rictus diabolique. Il avait repéré sa proie. C'était une vieille dame plutôt ronde, au dos voûté et aux paupières lourdes, cependant vêtue d'une veste de fourrure qui ne manquait pas de rappeler celle d'un Arcanin, laissant sous-entendre qu'elle venait des quartiers les plus riches de la capitale.
Elle tenait solidement un petit sac à main de cuir noir brillant, dont elle sortit brièvement une liasse de billets pour chercher un baume à lèvres qui était sans doute coincé en dessous.
« Pour que quelqu'un transporte une telle somme d'argent comme moi je transporte ma Poké-Ball, il faut vraiment être une personne aisée, se dit Damien en s'approchant silencieusement de la femme. Madame, madame, s'il vous plaît !
- Oh, que veux-tu mon cher enfant ? demanda-t-elle d'une voix cassée, chevrotante.
- C'est mon petit frère, madame, il s'est aventuré dans les allées de Piccadilly Circus, et quand il est revenu, il boitait et il était couvert de sang ! lança-t-il en feintant la panique.
- Oh mon dieu ! Tu ne veux pas que j'appelle les secours ? s'exclama-t-elle.
- Plus tard, venez d'abord, il a besoin d'aide ! » insista-t-il.
Elle le suivit sans se méfier. Le petit garçon sourit. En plus d'être fortunée, cette vieille dame était naïve. Il l'entraîna dans une impasse sombre qui sentait fort l'urine et les rats morts. La femme s'avança, visiblement surprise.
« Je ne vois nulle trace de ton frère, ne t'es-tu pas trompé ? » fit-elle en observant les environs, couvrant son visage marqué par la vieillesse d'un fin mouchoir blanc en dentelle, tentative vaine pour masquer l'immonde relent de poisson pourri.
« Tu as dû confondre deux ruelles, essayons de revenir sur nos pas et...mais qu'est-ce que...s'interrompit-elle.
- Je crois qu'on va s'attarder un peu par ici, histoire d'ajouter un bel article dans les faits divers...siffla Damien en s'armant de sa Poké-Ball, son couteau toujours camouflé sous son pull.
- Petit charlatan ! Crois-tu que mon âge m'empêchera de te remettre à ta place ? » riposta-t-elle en lançant sa Ball.
Le garçon fit sortir son Feunard qui jappa et montra des crocs à son adversaire, un Smogo qui flottait paisiblement, sans une once d'inquiétude dans le regard. Le renard ressentit cette indifférence face à ses menaces et recula d'un pas.
« Du calme Feunard, si on fait comme ce qu'on a convenu hier soir, on ne peut échouer. » songea l'enfant en fixant intensément son Pokémon de ses yeux sombres.
Comme s'ils avaient établi un accord tacite, le renard de feu lança un puissant Lance-Flamme. Mais le Smogo, sous les ordres de la vieille dame, esquiva sans difficulté et riposta d'un Détricanon. L'attaque frôla Feunard qui s'était jeté sur le côté. Malheureusement, il rata sa réception et s'étala de tout son long sur le sol de dalles poisseuses.
Le Pokémon Poison s'élança, préparant Damoclès. Le renard se redressa tenta de le stopper avec un autre Lance-Flamme mais la gerbe de feu eut l'effet inverse. Au lieu d'affaiblir la capacité, elle l'a renforcé en transformant Smogo en une boule de feu tourbillonnante, sans compter le gaz émanant de son corps qui attisaient les flammes. Damoclès toucha de plein fouet le flanc du Pokémon Feu qui s'écrasa contre des poubelles après quelques tonneaux. Il ne se releva pas.
« Bravo Smogo, nous lui avons donner une bonne leçon ! s'enthousiasma la femme. Mais où est donc ce vaurien ? »
Damien sourit, caché sous une bâche rapiécée, derrière ses cibles.
« L'atmosphère est lourde, de quoi m'inspirer un poème...se dit-il. Elle regarda partout autour d'elle, mais ne vit nulle trace de son agresseur. »
L'enfant rampa silencieusement vers la vieille dame.
« Son Smogo se rapprocha d'elle, méfiant. »
Collé à sa maîtresse, le Pokémon Poison observait les alentours, sur ses gardes.
« Les secondes s'étirèrent, on eût dit des heures. »
Damien était juste derrière elle, il bondit brusquement.
« Jusqu'à ce que la bourgeoise poussa un cri déchirant. »
Il abattit d'un coup sec la lame de son couteau dans le dos de la vieille femme qui hurla de douleur.
« Elle s'écroula tel un pantin désarticulé. »
Le garçon l'accompagna dans sa chute, remuant l'arme dans la plaie, avec un sourire sanguinaire qui s'étirait au fur et à mesure que le sang giclait, teintant sa chevelure blonde d'un rouge soutenu.
« Ses yeux s'exorbitèrent, comme ceux d'un animal apeuré.
- Comment...un...gamin...peut-il...
- Il n'y avait qu'incompréhension dans son regard presque éteint.
- Tu...n'es...qu'un... »
Elle fut saisie par les cheveux et sèchement égorgée.
« Ainsi en plus de la vie, c'est la parole que lui prit l'assassin. »
Il s'éloigna du cadavre, prenant au passage le sac à main de sa victime. Le Smogo, ne sachant que faire, paniqua. Cela lui fut fatal. Feunard qui, comme tous les autres représentants de son espèce, était par nature très rancunier, le prit à revers et le mordit violemment avec Croc-Feu. Les gaz du Pokémon s'embrasèrent de l'intérieur et il explosa, répandant une épaisse fumée violette que le renard dissipa à l'aide de ses sept queues.
Après cette horrible action, il regarda son dresseur avec le regard chargé de la même démence que celui-ci. Il lui sourit et caressa sa fourrure roussie, souvenir de l'attaque Damoclès. Il lui remua des billets sous le museau.
« Avec ça, on prendra soin de ton pelage, murmura Damien. Tu as très bien rempli ton rôle, c'était une très bonne diversion, le temps que je me cache. »
Ils quittèrent sans se presser l'impasse où ils avaient commis leur terrible meurtre, et tout fier de son coup, ne se lassant pas de regarder les bouts de papier verts qui le rendaient à présent plus riche que Silver, il se mit à répéter sans fin l'ignoble poésie qu'il avait inventé, improvisant cependant quelques vers supplémentaires.
"Entraînée dans une impasse
L'ancêtre fit volte-face
Se préparant à combattre avec son Smogo
Celui dont l'identité sera bientôt celle de son bourreau.
Elle n'eut pas d'hésitation et attaqua
Entraînant le Feunard de l'ennemi vers le trépas.
Elle regarda partout autour d'elle, mais ne vit nulle trace de son agresseur.
Son Smogo se rapprocha d'elle, méfiant.
Les secondes s'étirèrent, on eût dit des heures.
Jusqu'à ce que la bourgeoise poussa un cri déchirant.
Elle s'écroula tel un pantin désarticulé.
Ses yeux s'exorbitèrent, comme ceux d'un animal apeuré.
Il n'y avait qu'incompréhension dans son regard presque éteint.
Son sang s'écoulait, teintant les dalles.
Elle geint, ses lamentations pour son agresseur étaient infernales.
Il lui trancha la gorge jusqu'aux cordes vocales.
Ainsi en plus de la vie, c'est la parole que lui prit l'assassin".
Chapitre 3 : In love with red - Spoiler:
Le vent s'était levé avec violence. Le marché était un peu désorganisé, à cause des nappes qui s'envolaient, emportant les produits que proposaient les vendeurs, paniqués en voyant leur marchandise échapper à leur contrôle.
C'est sans un regard pour eux que Damien traversa la place pour la deuxième fois, mais dans le sens inverse. Il se contrefichait de voir des bouts de tissu bariolé voler à tout va, des paniers de fruits se renverser devant ses pieds, nourriture qu'il écrasait avec insistance, comme s'il prenait plaisir à voir gicler le jus de ces oranges trop mûres.
« Ne te gêne surtout pas, gamin ! brailla le commerçant.
- Je vous remercie, mais comme vous pouvez le constater, je ne me gêne pas, répondit l'intéressé sur un ton faussement ironique, serrant le couteau sous son pull.
- Tu vas me repayer ça, illico ! » beugla l'homme.
Le garçon fit la grimace. Mais ce n'était pas le moment de faire un scandale en se rebellant. Cependant, une idée germa dans son esprit. Il arracha discrètement quelques uns des poils de la queue de son Feunard, qui s'efforçait de ne pas réagir. Il les mit bout à bout et attacha ensuite le long fil à la liasse de billets qu'il tendit au marchand.
Ravi d'avoir obtenu autant d'argent, il le laissa partir, et dès que l'enfant eut bifurqué, quelques mètres plus loin, dans une autre ruelle, il rangea sa cagnotte dans une boîte en fer qu'il verrouilla méticuleusement. Mais il n'avait pas remarqué la ficelle qui dépassait de sa caisse et quand il eut le dos tourné, Damien tira, récupérant ainsi la totalité de ses gains, et même davantage.
« Eh, au voleur ! » s'écria le vendeur.
Mais c'était trop tard, il s'était enfui, victorieux et fier de l'être, malgré ses actes immondes. Feunard courait joyeusement avec lui, et il savait qu'en récompense pour son travail ardu, il aurait le droit de rester hors de sa Poké-Ball. Cette perspective le réjouissait autant que son maître, et ni l'un ni l'autre n'avait de regrets.
« Dans le monde, il y a deux catégories de personnes, les chasseurs, et les chassés, murmura le dresseur, s'adressant à son Pokémon. Et en un jour, nous sommes passés dans le meilleur des deux camps, qu'en penses-tu, mon ami ? »
Pour toute réponse, le renard de feu jappa avec enthousiasme, et tous deux fendirent l'air, comme s'ils tentaient de faire une course contre le vent. Un sourire malsain se dessina sur le visage au teint cireux du petit garçon quand il vit le Corboss de son frère se précipiter sur sa victime et manquer son coup. Même si voir une défaite de son frangin, néanmoins ennemi, était très réjouissant, il ne s'attarda pas et fila droit vers le château Redsworm.
Il arriva devant l'immense porte de sa demeure, d'un bois sombre et poli, gravé d'arabesques d'une complexité déconcertante, qui pourtant n'impressionnaient guère Damien qui franchit le seuil d'un pas assuré.
Il fut accueilli par un serviteur qui l'observait avec dédain. Même les domestiques ne le respectaient pas. La seule personne qui ne le rejetait pas systématiquement, c'était Prune, la servante qui s'occupe du petit-déjeuner. Le garçon n'irait pas jusqu'à dire qu'il l'apprécie, car il n'avait encore jamais vraiment eu de discussion avec elle, mais elle occupait quand même une place à part dans son estime.
Quand il s'ennuyait, ce qui arrivait souvent lorsqu'il était isolé dans la mansarde, il faisait des listes sur de vieux bouts de papier qu'il cachait sous son matelas. Des classements, pour être plus précis.
Dans la colonne à l'extrême gauche, les gens qu'il détestait le plus, environ tout le personnel du manoir, et bien entendu sa propre famille.
Au centre, les personne sans importance particulière, comme Prune, justement. Mais pour lui, des personnes qui ne comptent pas sont appréciées, car il préférait l'ignorance au mépris.
Tout à droite, au contraire, ses proches, avec juste deux noms. Feunard, évidemment, et aussi une certaine Claire, qu'il n'avait pourtant que très peu connu...
C'était une gentille petite fille qu'il avait rencontré un soir d'hiver, à seulement six ans, alors qu'il pleurait parce qu'une fois de plus, il n'avait pas trouvé d'argent pour son père. Assis sur un trottoir à sangloter, il avait sentit une moufle de laine se poser sur sa fragile épaule.
Il s'était retourné brusquement, croyant qu'il s'agissait de l'homme qu'il avait tenté de voler précédemment, mais s'était détendu en voyant la mine réjouie d'une jeune enfant, qui semblait avoir son âge.
« Pourquoi t'es tout triste ? Soit content ! Moi, je suis contente ! avait-elle clamé haut et fort. Tu sais pourquoi ? »
Il avait secoué la tête en signe d'ignorance. Il avait alors vu, sur le visage de la fillette, se dessiner un grand sourire débordant de gaieté, et elle avait saisi sans prévenir ses petites mains gelées entre les siennes, que d'épais gants roses gardaient au chaud.
« Demain, c'est Noël ! Et maman m'a dit que le Père Noël m'apporterait plein de cadeaux car j'ai été très sage ! s'était-elle exclamée, ravie.
- ...Noël ? avait répété timidement Damien. C'est quoi Noël ?
- Tu ne sais pas ? » s'était-elle étonnée.
Nouveau signe de la tête. La petite semblait stupéfiée. Soudain, une voix féminine s'était faite entendre :
« Claire, par ici, cesse de traîner avec des gens que tu ne connais pas ! Papa nous attend !
- Oui maman, j'arrive, une minute ! avait répondu la jeune fille. Ecoute-moi, demain, je vais faire des courses avec papa et maman, alors je reviendrai ici, à la même heure ! Tu seras là, d'accord ? J'aurai quelque chose pour toi ! »
Elle s'était éloignée en courant, disparaissant dans l'angle de la rue, laissant le petit garçon sur son trottoir, encore déboussolé par cette rencontre inattendue.
« Claire... » avait-il psalmodié inlassablement en prenant le chemin pour rentrer chez lui affronter le courroux de sa dure famille.
Le lendemain, après avoir essuyé plusieurs échecs cuisants, il avait attendu, par curiosité, la venue de cette étrange fillette. Comme elle l'avait annoncé, elle l'avait rejoint, toute guillerette, emportant son éternel sourire avec elle. Elle serrait contre elle un sachet plastique qu'elle lui avait tendu, insistant pour qu'il le prenne.
Il avait plongé sa main dedans, encouragé par les regards approbateurs de l'enfant, et en avait sortit des gants d'un rouge vif, lumineux, intense.
« Le plus beau rouge du monde, avait songé Damien en caressant la laine.
- Eh ben, mets-les ! Je veux voir si j'ai bien choisi ! Sauf si t'aimes pas...avait-elle ajouté tristement
- Si, j'aime bien...merci... » avait-il marmonné en les enfilant.
Même si les moufles étaient trop grandes, il se sentit immédiatement soulagé, en sentant une douce chaleur envelopper ses doigts ankylosés par le froid. Mais il se sentait gêné, car il n'avait rien à lui offrir en retour. Il le lui avait dit en lui redonnant le présent, confus.
« Mais garde-les ! C'est ça Noël ! Tu donnes sans rien attendre en retour ! avait-elle expliqué. Comme ça, le monde est plus jolie, tu ne penses pas ? »
Il n'avait pas eu le temps de répondre qu'elle était partie, rattrapant ses parents.
« Le monde est plus jolie...donner sans rien attendre en retour...Noël... »
Il fit quelques pas, s'apprêtant à retourner à sa demeure. Il se retourna une dernière fois vers l'angle de rue, là où il avait perdu de vue cette petite au caractère si plaisant, puis avait posé les yeux sur ses épais gants incarnat qui protégeaient de leur mieux ses pauvres mains glacées.
L'ébauche d'un sourire estompant légèrement les creux de ses pommettes, le jeune garçon murmura, comme s'il voulait que ses paroles soient assez légères pour être portées par le vent :
« Claire... »
Damien se réveilla en sursaut, alors que le vent avait brusquement ouvert la lucarne de son grenier, faisant entrer un froid virulent. Il maudit sa famille pour la énième fois en refermant la fenêtre. Il jura. La vitre était brisée. Il regarda au dehors. Le soleil allait se coucher. Il avait beaucoup dormi.
Il avait gardé son couteau coincé entre la ceinture et le jean, camouflé par le pull noir, aussi il veillait à ne pas faire de mouvements trop brusques, pour ne pas se blesser. Il vérifia que l'argent était toujours sous son matelas, là où il l'avait caché en rentrant à midi. Il sourit. Son butin n'avait pas bougé, et il le sentait au travers de sa couchette.
Soudain, son sourire s'effaça. Il ressortit de sous quelques billets verts une veille paire de gants un peu miteux, dont la laine était colorée d'un rouge sans éclat, ternit, délavé. Il la regarda longuement, silencieusement, replongeant dans de vieux souvenirs. Il regrettait de l'avoir laissée à l'abandon, maintenant, elle était abîmée. Et cette couleur vermeille qu'il appréciait tant n'était plus qu'une vague teinte corail, sale et sans profondeur.
Il secoua la tête pour reprendre ses esprits, et regarda son Feunard qui dormait toujours, épuisé par les efforts fournis la matinée. Il fourra ses moufles dans les poches de son pantalon, laissa son Pokémon se reposer et descendit rejoindre Pierre, Silver et Marine. C'était l'heure de montrer ses gains.
« Que faisais-tu dans ta chambre, toi ? tonna son père.
- Je vous prie de m'excuser pour mon retard, je recomptais l'argent amassé pour la journée, répondit l'enfant.
- De l'argent ? Laisse-moi rire ! pouffa son frère, plié en deux.
- Silver, s'il te plait, coupa sa mère en agitant ses doigts pour faire sécher son affreux vernis rose bonbon. Laisse-le nous montrer sa récolte. Si l'on peut dire... »
Tous se turent en voyant l'immense fortune qu'étalait leur fils de 10 ans sous leurs prunelles avides. Silver ouvrait et fermait la bouche tel un poisson dans son aquarium, et cette ressemblance était accentuée par ses yeux qui s'exorbitaient de façon grotesque.
« Mais comment...eh, ce sont mes vêtements ! » s'écria-t-il brusquement.
Il empoigna son frère par le col et le secoua dans tous les sens. Ses parents s'interposèrent mollement, non pas pour aider Damien, mais surtout parce que le tapage risquait de renverser la table où sont posée les billets.
Le drame arriva. L'arme que le petit garçon cachait avec tant de difficulté tomba au sol, la lame encore souillée par du sang mal essuyé. Le silence se fit. Bien que les parents laissaient carte blanche à ses fils question méthodes pour s'enrichir, il y avait une condition, une seule. Ne jamais tuer. Et cet enfant avait enfreint la règle.
« Comment as-tu osé ? Sale rejeton, fils indigne, espèce de merdeux ! tempêta Pierre en se saisissant du tisonnier ardent de la cheminée.
- Je n'ai pas tué ! J'ai blessé, mais je n'ai pas tué ! mentit le garçon.
- Menteur ! fit son frangin en le soulevant par dessous les épaules. T'es qu'un assassin, tu ne mérites pas de vivre sous notre toit ! »
Damien hurla de douleur en sentant les pincettes incandescentes attaquer sa chair. Son père le brûla encore et encore, lui infligeant sans cesse cette même torture. Soudain, rassemblant ses trop maigres forces, mais que son courage comblait, il cria :
« Feunard, Lance-Flamme ! »
Le renard surgit ses ombres de l'escalier et s'exécuta. Silver n'eut pas le temps d'appeler Corboss que son dos fut carbonisé par la gerbe de feu. Il se roula à terre, geignant comme un nouveau-né, relâchant son étreinte autour de son petit frère qui se dégagea tant bien que mal, malgré sa souffrance.
Son Pokémon enchaîna avec plusieurs autres Lance-Flamme, incendiant la maison. Pierre se jeta de côté mais il fut écrasé par une poutre enflammée qui s'était détachée du plafond. Les domestiques courraient dans tous les sens, paniqués, marchant sur ceux qui gisaient dans les cendres, à l'agonie.
« Seraient-ce les enfers ? songea le petit garçon en observant la scène. C'est merveilleux, tout ce rouge... »
Son Feunard s'approcha, l'invitant à le chevaucher. Il grimpa et son compagnon zigzagua entre les décombres recouvrant des corps sans vie. Il était dans ce qu'il restait de la cuisine, approchant de la sortie, quand Damien fut saisi par le bras. Il chuta et se redressa péniblement, toussant à cause de l'épaisse fumée du bois qui flambe.
« Emmène-moi, mon adoré, mon trésor, emmène-moi ! »
C'est sa mère qui la suppliait à genoux, sa figure marquée des noirs sillons des larmes qui font couler le mascara. Elle aurait fait pitié à n'importe qui, mais pas à son fils qui se saisit d'un morceau de métal coruscant et le lui planta dans la tempe, de toute la puissance de sa rage. Il vit le rouge du sang couler le long de ses doigts, tandis que sa marâtre rendait son dernier soupir, l'expression déformée par la terreur.
Il s'éloigna le plus possible de la demeure Redsworm, d'où s'échappaient d'immenses flammes rougeoyantes, qui embrasaient le ciel tout entier de cette couleur si forte, si prononcée. L'enfant ressortit de ses poches ses mitaines effilochées, les yeux brillants d'une lueur angoissante, insensée.
« Le rouge, c'est si beau, comme cet incendie. Et le sang, surtout le sang, c'est chaud et vermeil, comme les gants que tu m'avais offerts, Claire, chauds et vermeils. Et j'en veux davantage, pour te rappeler à mon souvenir... »
Chapitre 4 : Stupid - Spoiler:
Cela faisait plusieurs heures que Damien marchait, presque invisible dans la foule, tant il était petit par rapport aux adultes. Son Pokémon dormait paisiblement, sagement rentré dans sa Poké-Ball, et aucun des deux n'était tourmenté par leurs crimes.
Le petit garçon en était même gonflé de fierté, parce qu'il avait eu le courage de se révolter, alors que d'autres à sa place se seraient sagement pliés sous cette tyrannie familiale. Sous ce despotisme. Sous cet esclavage.
Feunard, lui, n'en pensait pas moins. Il ne supportait plus de voir son maître martyrisé, chanceler sous les coups, hurler sous les tortures, et vivre ce qui s'apparentait à l'enfer.
Longtemps, il a essayé de le distraire, de lui remonter le moral en faisant des cabrioles et en jappant de façon joyeuse. Mais il n'a jamais réussi à le faire rire d'allégresse. Il ne parvenait à lui arracher que quelques sourires tristes.
Mais il n'avait jamais cessé de l'aimer, cet enfant si frêle et pourtant si impassible, si fragile et pourtant plus solide que les plus imposantes constructions humaines.
Car même si un mur de béton résiste aux chocs, s'il est détruit, il ne peut se réparer seul. Alors que son dresseur, même si son esprit flanche, ce qui n'est encore jamais arrivé, tôt ou tard, il se relèvera plus fort qu'avant, et ce sans aucune aide. Sans rien ni personne. Il n'a pas besoin d'amis, ni d'alliers. Seulement de pions.
Le renard le sait, lui-même n'est qu'un pion dans son jeu. Mais un pion plus important que les autres. Un pion qui n'attend que les ordres du roi pour le protéger, même s'il devait se sacrifier. Un pion qui peut se déplacer sur toutes les cases de l'échiquier de la vie, sans pour autant en être la reine. Le premier pion de son armée. Le premier...
« Silver ? Silver ! Viens, nous avons une jolie surprise pour toi ! s'exclama sa mère.
- Oui maman, j'arrive tout de suite ! Pousse-toi, tu me gênes ! » brailla l'enfant en bousculant son petit frère.
Comme celui-ci n'avait que quatre ans, la force de son frangin, qui avait le double de son âge, le fit tomber violemment au sol, et il se tapa la tête contre le dur et froid carrelage blanc étincelant. Du sang s'étala sur le sol immaculé, le tachant de rouge, et la mare poisseuse ne cessait de s'étendre.
« Rhaaa, sale gamin, tu ne peux pas faire attention ? C'est un calvaire de nettoyer ces dalles ! » rouspéta Marine, alors que ce sont les femmes de ménage qui se chargent de la propreté du château.
Elle claqua des doigts et un domestique se hâta de relever l'enfant qui gémissait, des larmes roulant comme de petites perles sur ses joues creuses, amaigries. Il l'emmena dans la salle de bain et le soigna, mais sans y mettre aucune bonne volonté. S'il s'occupait de lui, c'était juste pour qu'il ne saigne plus et qu'ainsi il ne salisse plus la demeure. D'ailleurs, dès qu'il eut terminé, il le fit froidement sortir de la pièce qu'il astiquait de son mieux pour faire disparaître les traces incarnates qui avaient coulé le long de la baignoire.
Il rejoignit timidement ses parents qui étaient réunis autour de leur fils aîné, qui paraissait très heureux. Il semblait tenir quelque chose dans ses mains, mais Damien ne pouvait rien voir, car Pierre lui cachait la vue. Quand enfin il y eut une ouverture pour le regard, il aperçut une petite balle rouge et blanche que Silver agitait fièrement.
Soudain, celui-ci se rua sur le petit garçon qui eut un mouvement de recul, effrayé. Il s'arrêta net, et pencha son visage rondouillard et un peu rougeau devant celui de son frère, pâle et hâve. Le contraste était flagrant, surtout que le plus jeune avait les cheveux blonds platine de sa mère, alors que l'autre héritait de la chevelure noire de son père.
« Eh microbe, tu sais quoi ? Moi, j'ai un Cornèbre, maintenant, et pas toi, na ! railla Silver en secouant la Poké-Ball pour narguer l'enfant qui serra le poing. Mais pour en obtenir un, faut travailler ! Moi, j'ai rapporté en tout 10000 Poké-Dollars en une semaine ! Et toi, 10 centimes ! Parce que t'es nul ! Tu sers à rien, t'es nul, t'es nul ! Tu n'auras jamais de Pokémon comme moi, papa et maman ne t'en donneront jamais, t'es nul ! T'es... »
Il se tut brusquement, et s'affaissa aux pieds de son frangin, ne parvenant plus à produire le moindre son, se tenant fébrilement l'entrejambe, là où il venait de se prendre un coup de poing assez impressionnant.
« Tais-toi, méchant ! piailla Damien, les sourcils froncés et le nez retroussé.
- Oh, Silver, mon adoré ! Toi, tu ne perds rien pour attendre, fils ingrat ! maugréa Marine en fixant le petit garçon avec haine et mépris.
- Prends ça ! tempêta Pierre en lui infligeant un grand coup de bâton. Et file dehors, je ne veux plus te voir avant demain ! »
L'enfant s'enfuit, de peur de se faire frapper de nouveau. Il erra sans but dans les rues de Londres, ne sachant que faire, n'essayant même pas de voler quelque chose. Son estomac grognait avec insistance. Cela fera bientôt deux jours qu'il n'avait pas mangé.
Il passa devant un parc aux couleurs vives, il poussa doucement la grille et entra. Il s'assit sur un banc de bois peint en vert pomme, à l'ombre d'un vieux platane. Il observa discrètement les enfants jouer, recroquevillé comme s'il essayait d'effacer sa présence.
Une petite fille lançait une pierre sur le sol où était dessiné une sorte de grille. Elle sauta entre les cases, esquivant celle où le caillou était tombé. Ensuite, une autre ramassa le galet et le relança, ne se lassant pas de ce jeu qui pourtant semblait très répétitif. Damien ne connaissait pas la marelle.
Un garçon plus grand escaladait un mur grâce à des appuis en forme de poires, de pommes, ou de citrons, redescendait le long d'une rampe en métal, et remontait sans cesse. Un autre faisait de même sur un toboggan. Il grimpait à l'échelle, et s'élançait. Parfois sur les fesses, parfois sur le ventre, parfois sur le dos.
Mais c'est un tout petit enfant qui attira ensuite son attention. Sachant à peine marcher, il se dirigeait en zigzaguant vers son père qui lui tendait les bras. Dès que le garçon saisit un de ses doigts, il fut saisi par le dessous des épaules et soulevé. L'homme tourna, tourna encore, tandis que l'enfant écartait les bras tel un oiseau, riant aux éclats. Il tournait toujours plus vite, élevant toujours plus haut son fils qui criait toujours plus fort, toujours plus heureux.
« Eh bien, mon petit, tu ne joues pas avec les autres ? » fit une femme qui s'était installée près de lui.
Damien sursauta et s'écarta brusquement. Mais il avait surestimé la longueur du banc et dépassa le bord, s'écrasant sur le sol. Il souffla sur ses paumes incrustées de gravillons, et se redressa péniblement.
« Je suis désolée, je ne voulais pas te faire peur, tu vas bien ? » s'exclama la demoiselle, se confondant en excuses.
Pour toute réponse, il se rassit, mais plus loin qu'avant. L'inconnue se tut, mais le dévisageait avec une curiosité agaçante.
« Tu es tout seul ? » demanda-t-elle.
Elle n'obtint aucun mot, aucune réaction.
« Moi, je venais souvent ici, avec mon époux et ma petite fille, elle adorait ce parc. »
Le garçon jouait avec une feuille qui venait de tomber de l'arbre qui s'élevait au-dessus de lui, écoutant distraitement les dires de la jeune femme.
« Elle allait fêter ses trois ans, alors j'ai décidé de lui offrir un cadeau qu'elle n'oublierait jamais. Quelque chose de fantastique, dont elle ne pourrait jamais se passer. Je l'ai emballé avec amour, je venais de l'obtenir. Je suis rentrée chez moi, ravie, avec en plus un gâteau d'anniversaire. J'ai franchi le pas de la porte... »
Elle s'interrompit pour renifler et essuyer du revers de sa main quelques larmes. Mais l'enfant ne semblait pas être ému, ne comprenant pas comment on pouvait sangloter sans être blessé. Lui ne pleurait que lorsqu'il était tapé, où qu'il se faisait vraiment mal, comme précédemment, au manoir.
« ...j'espère qu'elle est heureuse, avec son père...je ne les ai jamais revus...plus eu aucunes nouvelles...je savais que mon cher mari aimait une autre que moi, mais je ne pensais pas qu'il partirait avec ma précieuse Claire...aujourd'hui, elle doit être en train de fêter ses cinq ans. J'ignore s'ils ont quitté Londres, mais en tout cas, je prie chaque soir pour leur bonheur. Un bonheur qu'ils n'auraient pas obtenu avec moi, qui ai si peu d'argent... »
Elle se releva, essuyant ses yeux humides avec un mouchoir en papier.
« Je ne sais pas pourquoi je te raconte ça, tu es trop jeune pour ce genre d'histoires, après tout, De toute façon, tu es la dernière personne à qui je parlerai, c'est fini, je décroche. Tends tes mains, s'il te plait. »
Intrigué, Damien s'exécuta. Elle déposa avec délicatesse un petit paquet dans ses paumes encore rougies à cause la chute sur les graviers. La boîte était découpée dans du carton rose, et fermée par un ruban doré avec de petites fées argentées cousues aux extrémités.
« C'est ce que je voulais lui offrir. Je sais que l'emballage est très féminin, mais le contenu devrait te plaire. J'attendais le bon moment pour le donner. Je l'ai souvent ouvert, puis refermé, un peu indécise, mais je pense qu'il est temps que je m'en sépare une bonne fois pour toute. En tout cas, même si tu n'as sans doute pas bien compris ce que je t'ai dit tout à l'heure sur ma triste vie, tout ça, je te remercie de m'avoir permis de me confier. Au revoir, petit, qu'Arceus veille sur toi et t'assure un avenir plus radieux que le mien. »
Elle s'éloigna, franchissant la grille du parc, se retournant plusieurs fois pour regarder l'enfant ouvrir son cadeau. Elle sourit en voyant ses yeux briller devant une petite boule rouge et blanche, la faire étinceler au soleil, appuyer sur le bouton central pour découvrir un petit Goupix qui s'étonna de voir quelqu'un d'autre que la demoiselle qui s'occupait de lui auparavant.
Le petit garçon n'en revenait pas. Ce Pokémon était si beau, si doux, si chaud et si affectueux, pourquoi s'en était-elle débarrassée ? Il regarda sa silhouette traverser la route, s'arrêter au milieu en écartant les bras, alors qu'un camion fonçait à vive allure sur elle...
Il faisait nuit. Damien s'était réfugié sous un abribus pour dormir, serrant solidement la Ball contre sa poitrine, en pensant au Goupix qui se reposait à l'intérieur. Demain, il pourrait rentrer au château Redsworm. Demain, il présenterait son compagnon à sa famille en disant qu'il l'avait volé, comme ça, ils accepteraient peut-être qu'il le garde.
Il regarda le passage piéton à côté de lui. Il ne restait de la femme de tout à l'heure qu'une trace rouge de sang mal nettoyée. Elle était morte sur le coup, selon les passants qui avaient tentés de la secourir.
N'importe quel adulte connaissant l'histoire de sa vie aurait eu pitié d'elle, aurait compris son geste. Mais Damien n'était pas adulte. Damien n'avait que quatre ans. Quatre malheureuses années ne sont pas suffisantes pour avoir un cœur assez gros et y loger tous ces sentiments trop flous.
Il ne comprenait pas pourquoi elle avait abandonné la vie alors que c'est quelque chose d'unique. Si elle voulait mourir, elle aurait pu attendre, puisque tôt ou tard, la fin vient naturellement à vous. Mais c'était encore trop compliqué pour lui. Alors il en est arrivé à une conclusion plus simple, et pas forcément fausse :
...
...
Elle était stupide.
Chapitre 5 : The knife - Spoiler:
Elle marchait tranquillement avec ses parents, se retournant de temps en temps vers la rue qu'elle venait de quitter, espérant voir le petit garçon à qui elle venait d'offrir des moufles rouges. Mais elle ne l'aperçut pas. Cela l'attrista un peu. Elle aurait pu en faire un ami. Elle n'avait même pas demandé son prénom.
« Claire, ma puce, qu'est-ce que tu as ? Tu as vu le père fouettard ? demanda sa mère en plaisantant.
- Euh...non maman, ça va. Je regardais...le clocher de l'église, là-bas, répondit-elle, confuse.
- ...je vois de quel clocher tu parles, mais comment peux-tu le voir avec ce brouillard ? Tu as vraiment une vue exceptionnelle. » remarqua son père.
La petite fille sourit, mais en réalité, cette qualité la rendait triste. Parce qu'elle voit mieux que les autres, elle aime faire peur aux enfants de son école en lançant des objets qui leur frôle l'oreille, pour les faire sursauter. Mais ce passe-temps a fait qu'elle était toujours seule, personne n'osait l'approcher. Mais le garçon qu'elle avait croisé tout à l'heure semblait différent, elle le sentait. Mais sans doute ne la reverrait-elle plus jamais. Londres est trop vaste.
« Claire, où vas-tu, on est arrivé chez nous ! » s'exclamèrent ses parents.
Elle se rendit compte qu'à force de réfléchir, elle avait dépassé sa maison et continuait de suivre la route. Elle revint immédiatement sur ses pas en s'excusant de son étourderie.
Dès qu'elle eut enlevé sa veste et ses chaussures, elle fonça vers sa chambre et en referma la porte. Après s'être assurée que ses parents ne montaient pas la voir, elle sortit de sous son lit une boîte métallique et en sortit un couteau de platine, très rare et très cher, qu'elle avait trouvé dans la chambre de ses parents. Elle sortit aussi son jeu de fléchettes, mais ne prit que la cible, qu'elle accrocha à la place d'un tableau. Elle se mit dos à la porte, face au disque coloré.
Elle entendit un petit couinement. Un adorable Goupix shiney la rejoint et se frotta à ses jambes, espérant des caresses. Elle sourit et le prit dans ses bras.
« Ah la la, c'est toujours quand je veux m'entraîner à viser que tu veux des câlins ! rouspéta-t-elle gentiment. Bah, je peux très bien lancer ce couteau en te portant ! »
Sitôt qu'elle eut fini sa phrase, la lame fendit l'air et se planta au centre de la cible.
« Encore gagné ! »
Pendant ce temps, en bas, ses parents discutaient :
« Elle a de fortes prédispositions, il faudrait lui trouver une école adaptée...murmurait la mère.
- J'en connais une qui permet de s'entraîner avec son Pokémon, et qui propose aussi plusieurs options, dont celle qui nous intéresse. On pourrait l'inscrire...suggéra le père.
- On se renseignera, mais il faut avouer que sa vue est hors du commun. Je me demande si elle a hérité ça de sa mère biologique...
- Peu importe, elle s'est suicidée. Et ce n'était pas une mère convenable, elle ne s'en occupait pas assez.
- J'ai toujours l'impression que tu me caches des choses sur elle...mais bon, tu dois avoir tes raisons. Bien, il est temps de passer à table, on dirait. Claire, on mange !
- J'arrive ! » fit-elle en dévalant les escaliers, suivie par son renard.
Damien s'arrêta net. Il se tint là, immobile, le nez enfoncé dans le col de son pull. Il était seul, seul face à un immense bâtiment, s'élançant vers le ciel tel un spectre maléfique, étendant son ombre démoniaque sur le sol de terre brassée par les passages des voitures.
Des pics d'acier imitation platine sortait du béton peint en noir corbeau, leurs pointes étincelant sous les rayons de la pleine lune. On eut dit qu'elles allaient fendre l'air et transpercer tout ce qui pourrait se trouver sur leur passage.
L'atmosphère était pesante à cause de cet immeuble lugubre, dont la lumière s'échappant des rares fenêtres ayant encore les volets ouverts semblait observer le petit garçon qui se présenta devant la porte et appuya sur la sonnette.
Il entendit des pas résonner, se rapprocher de lui, faisant toujours le même bruit : tac, tac, tac...
Une jeune femme élancée à la chevelure châtain lui ouvrit et l'invita à entrer avec un grand sourire. Il la toisa avec une certaine curiosité. Elle était vêtue d'un tailleur gris aux larges épaules. La veste était un peu ouverte près du cou pour laisser apparaître le col de sa chemise blanche, fermée par un petit nœud cyan très féminin, qui mettait en valeur ses grands yeux saphir, encadrés par quelques mèches de cheveux trop courtes ne pas s'échapper de son chignon.
« Bonsoir, bienvenue à E.D.E.N, "l'Ecole des Dresseurs Expérimentés ou Novices". Êtes-vous seul ? »
Le jeune garçon acquiesça.
« Nous inscrivons gratuitement les enfants de moins de 12 ans, s'ils sont accompagnés d'un Pokémon. Avez-vous le votre ? »
Nouveau hochement de tête.
« ...où sont vos parents ? Ils me faut leur accord écrit pour vous inscrire...précisa-t-elle.
- Hélas, ils sont partis en voyage d'affaire, et ils ignoraient qu'il me fallait leur autorisation pour venir ici. Mais dès leur retour, ils règleront cette histoire. Puis-je quand même être inscrit ? » s'excusa-t-il, ne laissant pas transparaître sur son visage émacié qu'il s'agissait d'un mensonge.
L'hôtesse sembla contrariée, et elle se dirigea d'un pas souple vers son bureau. Ses hanches se balançaient gracieusement malgré sa jupe très serrée au niveau des cuisses, enlaçant légèrement les genoux. Damien se demanda comment elle pouvait garder l'équilibre avec les talons aiguilles de ses chaussures de ce même bleu primaire, s'associant parfaitement avec ses fins bas noirs.
Elle s'installa sur un siège en cuir, faisant face à son ordinateur, et pianota frénétiquement sur le clavier. Au bout de quelques minutes, elle se releva en souriant :
« Je me suis arrangée. Vous pouvez rester ici jusqu'au 26 novembre. Mais ensuite, il faudra que vos parents vous autorisent à rester. Vous devez signer ici, en temps qu'élève provisoire, cela vous convient-il ? »
L'enfant ne prit pas la peine de répondre, et il signa le papier d'inscription. Il la regarda avec dédain. Ses grands airs ne lui plaisaient pas. Il l'aurait bien poignardé, mais cela aurait attiré l'attention, et de plus, il n'avait plus d'arme. Son couteau était resté dans les décombres de son ancienne demeure, ainsi que le bout de métal dont il s'était servi pour assassiner sa mère.
L'hôtesse le guida à travers d'interminables couloirs. Il croisa de nombreux autres élèves qui discutaient entre eux, ne prêtant guère attention à lui. Ils regagnèrent peu à peu leurs chambres quand ils entendirent l'horloge annoncer 22 heures.
« Voici votre chambre, vous la partagerez avec une jeune fille dont le nom m'a échappé, je regrette. Mais elle est très sociable. Sur ce, je vous laisse, bonne soirée ! »
Damien la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle disparaisse dans un angle du couloir. Il soupira et entra dans sa nouvelle chambre. Ce n'était pas du grand luxe, mais il fut ravi de constater que c'était bien plus confortable et accueillant que la mansarde où il dormait auparavant.
Un lit superposé, dont la partie basse semblait être occupée par la fille en question à cause des peluches qui traînent dessus, une armoire placée près de la fenêtre, une étagère et un bureau un peu en désordre.
Mais ce qui attira l'attention du garçon, ce fut un objet brillant qui dépassait d'une poche d'un pantalon suspendu au portemanteau à côté de la porte. N'ayant pas perdu ses habitudes de voleur, il le prit et le contempla avec un demi-sourire. Il s'agissait d'un couteau très aiguisé, sûrement très précieux, prenant des tons irisés sous la pâle lumière d'une lampe.
L'enfant fit sortir son Feunard de sa Poké-Ball et il lui annonça :
« On ne s'attardera pas longtemps ici, de toute façon, dans moins de trois mois, ils ne voudront plus de nous. Nous allons juste commettre quelques meurtres, histoire de prendre un peu d'argent, et de faire passer le temps. Tu verras, mon ami, nous prendrons vite du grade, et un jour, nous serons craints, on nous payera des fortunes pour que l'on arrête de tuer. »
Il le caressa longuement, se maudissant intérieurement d'avoir laissé brûler les billets qu'il avait obtenus lors de l'assassinat de la vieille dame.
Il entendit des pas se rapprocher. Il se mit en face de la porte, près à l'attaque.
« Notre première victime arrive, Feunard, prépare-toi. »
La porte s'ouvrit doucement, et Damien lança la lame droit vers le front de la cible.
Voilà voilà, bonne lecture ^^ | |
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